47. Prendre le métro en Iran (Téhéran / IRAN)
Ces quelques jours à Téhéran en Iran auront été pour moi l’occasion de prendre très régulièrement le métro, je tenais donc à m’étendre un peu sur ce que l’on y observe. Le métro est sans le savoir la fenêtre sur cour de nos sociétés. Il reflète, sans ravalements de façades, la réalité des rapports sociaux et des cultures. On ne peut pas tricher dans ce concentré de réel.
Des wagons réservés aux femmes
Première chose, il y a dans le métro de Téhéran des wagons réservés aux femmes. Et bien quitte à passer pour un affreux misogyne… je ne trouve pas cela choquant ! Bien au contraire, je pense que c’est un moyen sûr de s’éviter les incalculables harcèlements dont les femmes peuvent être victimes dans le métro parisien. Ce pays au dangereux obscurantisme religieux semble mieux protéger les femmes que chez nous. Il est d’ailleurs intéressant de voir que pendant les heures de pointes, les wagons des femmes sont des havres de paix avec bien plus de place que dans les wagons pour tous, dans lesquels on est entassés comme du bétail. Elles peuvent s’asseoir, parler entre elles, rire et voir les hommes de l’autre côté de la vitre admirer jalousement les privilégiées. Les hommes, il faut le dire, ont tendance à avoir les yeux rivés sur ce qu’il se passe derrière ce mur de verre, ce garde fou qui sacralise encore un peu plus la femme comme une créature de Dieu, sublime, vulnérable, inaccessible.
Le métro, un lieu d’échange
Autre surprise du métro, les gens sont de bonne humeur, ils se parlent facilement. Si deux personnes engagent la conversation, les voisins vont spontanément écouter et même participer à la discussion pour donner leur avis. Et tout le monde aux alentours regarde les protagonistes, sans gêne ni honte. A Paris, les gens feraient semblant de ne même pas remarquer que des gens parlent autour d’eux mais les écouteraient sans doute discrètement en regardant leurs chaussures ou leur smartphone.
Discuter « service militaire » dans le métro
Illustrons par l’anecdote : je suis au milieu du rame assez chargée, quand un jeune homme, s’adresse à un autre vêtu d’un uniforme militaire. Il semble que le premier lui parle d’un insigne qu’il porte sur l’épaule. Le militaire sourit immédiatement, ils échangent en riant parfois comme s’ils se connaissaient déjà. Dans mon interprétation des faits, l’homme avait été dans le même régiment pendant son service militaire et ils partageaient des anecdotes de l’armée. Peu à peu, on remarque les visages qui se tournent vers les deux personnages. Des inconnus rient en les écoutant, , commencent à entrer dans la discussion et échanger entre eux. Aucune barrière n’existe. Je suis en présence d’un groupe et non d’une somme d’individualités. Ici on se parle comme on se regarde et on se touche comme on se parle. En Iran, comme en Turquie, “je suis nous”.
Un respect omniprésent
Je remarque également qu’il y a un vrai respect pour les personnes âgées et les personnes diminuées. Dès qu’une personnes âgée entre dans le wagon, une ou deux places assises se libèrent immédiatement pour lui laisser la place. Plus surprenant, j’ai vu la même scène lorsqu’un jeune avec un bras plâtré est entré dans la rame.
Dans le métro de Téhéran, on respecte les Mollahs
Une autre forme de respect qui m’a intéressée, (peut être du respect forcé) celui envers les autorités religieuses. J’ai vu un Mollah entrer dans le wagon devant moi, les hommes faisaient presque une haie d’honneur pour lui. Afin de lui tracer le passage, on poussait agressivement les gens qui avaient eu l’impudence de se dresser sur sa route. On l’aidait et on lui parlait avec révérences. Dès qu’il avait un moment de répit, un homme venait d’adresser à lui pour lui parler de ses problèmes personnels, écouter ses conseils éclairés, tel un prêtre pendant la confession, sauf que la confession est à la portée de toutes les oreilles au beau milieu de la rame de métro. Je n’ose pas imaginer une scène pareille avec un prêtre en France…
Wagons réservés aux femmes, ouverture à l’autre, bonne humeur, déférence envers le religieux, respect du plus faible, solidarité… il semble que le moyen-âge iranien ne soit pas si terrible que cela. En vérité, j’ai ressenti autour de moi de la joie. Analyse à suivre…
>>> ETAPE SUIVANTE : 48. Trouver un bus de Kashan à Ispahan (Kashan / IRAN)
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