10. Des genoux agonisants de froid (Ratisbonne / ALLEMAGNE)

Méfiez-vous du froid. Si le vent est le pire ennemi du cycliste, le froid est l’ennemi de ses genoux. Le sous-estimer, c’est risquer de rentrer par hélicoptère.

Les souffrances du cycliste au long cours

En affrontant la route dans les tous premiers coups de pédale de mon voyage je surveillais mes maux de dos avec beaucoup d’attention, gardant un souvenir douloureux de précédentes sorties cyclistes à rallonge. Ces craintes étaient totalement fondées, elles se sont cruellement vérifiées sur le terrain. Il m’était parfois insupportable de continuer à rouler. Mais mon dos n’était pas le seul à souffrir, loin de là. J’avais souvent l’impression qu’un sorcier piquait à loisir une poupée vaudou de cycliste à mon effigie, visant selon son bon vouloir le dos, les fesses, les mains, les cuisses, les genoux… parfois tous en même temps !

croix route danube
Chacun sa croix

Des douleurs aux genoux inquiétantes

Mais parmi tous ces tourments, il y en a bien un qui jour après jour a réussi à détrôner les maux de dos pour leur voler complètement la vedette, il s’agit des douleurs aux genoux ! J’ai tout essayé dès les premiers jours : réglages du vélo, applications d’huiles essentielles, massages, straps et bandages, prise d’anti-inflammatoires, en passant par un repos d’une semaine accompagné de radios et IRM à Nancy… La douleur était telle que lors de ma pause nancéienne j’étais incapable même de marcher sans douleurs. Je boitais en gardant les genoux raides. Autant dire tout de suite que j’étais très inquiet pour la suite des événements. Incapable de prédire si j’allais pouvoir continuer ma route dans des conditions normales. J’étais perdu, pris à la gorge, emprisonné entre ces douleurs insupportables et cette envie si profonde d’aller au bout de mon rêve. J’ai donc forcé le destin : je me suis dopé d’anti-inflammatoires et j’ai avancé. 

Se soigner les genoux à tout prix

Si les médicaments m’ont aidé à diminuer les douleurs les jours suivants, ça n’était qu’une solution de façade qui ne soignait pas le mal à la racine. Je voulais comprendre ce qui n’allait pas, et ce qui était en train de transformer ce voyage tant rêvé en un cauchemar quotidien. On m’a appris qu’un mauvais réglage de selle, sur de grandes distances, pouvait rapidement engendrer des inflammations de cette nature, j’ai donc réglé la mire au millimètre près en l’optimisant tous les jours un peu mieux afin d’avoir la position parfaite, j’ai aussi changé mes pédales à Strasbourg pour améliorer la zone d’appui.

Le froid, grand coupable ?

Je me souvenais qu’un médecin des sports de Nancy m’avait aussi suggéré de chauffer mes genoux, affirmant que le froid pouvait être mauvais pour les articulations, mais j’étais très loin de m’imaginer que la solution pouvait être si simple, sentant vraiment des douleurs beaucoup trop intenses pour que ça vienne juste d’un genou enrhumé. J’ai donc suivi timidement ses conseils en les frictionnant parfois avant l’effort. Et pourtant… une étape au cœur de la Bavière va tout changer.

Coucher de soleil neige
A l’approche de Ratisbonne, la nuit tombe

Mes genoux sauvés de la plus bête des manières

J’ai passé deux nuits à Ratisbonne, charmante ville classée au patrimoine mondial de l’UNESCO, chez Ludwig, un jeune bavarois et cyclo-voyageur très expérimenté. Il m’a beaucoup aidé, m’a offert un manteau plus chaud dont il voulait se débarrasser, m’a fait acheter des nouveaux gants et m’a confirmé la théorie du froid ennemi juré des articulations et des genoux. Il m’a suggéré de porter sous mon pantalon des vieux protège-genoux de baseball en mousse en espérant que ça les tiendrait un peu plus au chaud. J’étais sceptique mais il insistait. Son deal était simple, je les porte pour lui faire plaisir pour ma prochaine journée de vélo, et si je sens que c’est contraignant et que ça ne change rien à mes douleurs, j’aurais essayé et je peux les jeter à la première poubelle venue.

Mais voilà, je les ai mis un peu sans trop y croire, à moitié amusé… le résultat m’a laissé sans voix ! En plusieurs dizaines de minutes, presque plus de douleurs au genoux droit ! Et le soir je les ai enlevés pour me promener dans la ville, la douleur est revenue. C’était si simple que ça, juste tenir les genoux au chaud et basta ! Je priais pour que le lendemain cette épiphanie ne reste pas un épiphénomène. La technique s’avèrera être la bonne, mes genoux ont progressivement retrouvé leur jeunesse et ils étaient totalement remis à mon arrivée en Turquie. Le froid n’a pas eu raison d’eux !

Voici un article intéressant sur l’application du chaud et du froid sur les genoux

>>> ETAPE SUIVANTE : 11. Le froid du Danube en hiver à vélo (Europe Centrale)