69. Une rencontre peut tout faire basculer (Beïnéou / KAZAKHSTAN)

Je suis toujours avec Thomas le Gallois, en plein désert, et je ne le sais pas encore, mais une rencontre s’apprête à bouleverser le cours de mon voyage.

Quand je n’arrive plus à suivre Thomas

Nous nous levons de bonne heure après une nuit très courte et épuisante, et je me rends vite compte à chaque coup de pédales qu’il va être difficile de soutenir le rythme effréné de Thomas.

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Sa moyenne est de 25 à 30 km/h avec un vélo deux fois plus léger que le mien. Il va vraiment trop vite pour moi, d’autant que ma douleur étrange de cette nuit se réveille. Je lui demande de s’arrêter et je lui explique le fossé évident qui nous sépare.

Il comprend et me laisse une bonne avance pour aller à mon rythme pendant qu’il va faire un petit détour dans un village pour y profiter des toilettes. J’avance tant que possible et je finis par prendre une petite pause.

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Une rencontre et une décision qui vont bouleverser le voyage

C’est à ce moment que je vois arriver vers moi deux camions Renault Traffic blancs identiques immatriculés à Lyon. Ça ne pouvait être que mes deux copains français avec qui j’ai sympathisé au port d’Alat et sur le ferry.

Ils me reconnaissent également et s’arrêtent sur le bas côté, nous discutons, je leur raconte ma route de nuit, mon épuisement, et soudain ils m’assènent le coup de grâce : « tu veux qu’on te prenne dans le camion ? On va à Beïnéou aujourd’hui ».

C’est ma destination.

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Prendre la bonne décision

J’hésite un moment, je pense à cette douleur aux jambes qui est apparue cette nuit, je pense au temps que je peux rattraper, mais aussi à la honte qui va s’abattre sur ma famille et ma descendance… Je m’arrange avec la honte et je saisis cette opportunité unique de gagner trois jours précieux.

Nous attendons le retour de Thomas pour lui expliquer la situation et lui souhaiter bonne chance pour la suite, et je monte dans la voiture de Florent, tandis que celle de Valérien transporte mon vélo et mes sacoches. Cap sur Beyneu ! Nous traversons des routes désertiques superbes que j’ai tout de même regretté de ne pas avoir traversé à vélo, mais tout choix est un sacrifice.

Florent et Valérien, mes sauveurs

Mes deux sauveurs sont Lyonnais. Ils s’y sont rencontrés en école d’ingénieur, et ont décidé après quelques années de labeur, de partir ensemble sur les routes du monde. Chacun son propre véhicule, chacun son autonomie et sa liberté. On voyage ainsi à deux mais en cas de divergences ou de raz-le-bol, chacun peut partir dans sa propre direction. C’est pas le moyen le plus économique de voyager mais la liberté n’a pas de prix !

Chacun camion est une vraie petite maison, avec son lit, sa bibliothèque, son robinet, ses réserves d’eau, de nourriture, ses outils et matériels de remplacement en pagaille, ses vélos… ils ont tout ! Ils ont bricolé eux même l’intérieur de leur fourgonnette et rien n’est laissé au hasard.

Que de rencontres sur la route !

Nous remontons l’unique route pour Beïnéou. C’est là que commence le ballet des rencontres.

Cette route étant la seule option possible pour rejoindre l’Ouzbékistan, nous avons passé la journée à croiser des camarades du ferry ou à dépasser des retardataires du fret précédent (d’il y a une semaine).

Nouvelle rencontre avec Harry

Tout commence avec ce bon vieux Harry, que l’on dépasse en pleine côte, à 260 kilomètres du point de départ. Pour rappel nous avons quitté le port la veille au soir. On s’arrête, il nous rejoint, nous salue, s’amuse de me voir dans leur camion, et nous explique qu’il n’a pas dormi de la nuit. En bref, il a fait la route d’une traite depuis le port… lui, son vélo et son chargement. 260 bornes sans dormir ! Une machine de guerre ! Il nous avoue commencer à être un peu vanné. Je lui offre de l’eau et de la nourriture, puis on partage un café avec lui et quelques selfies. Et il est reparti tutoyer le désert après 15 minutes d’une pause bien méritée… Salut l’artiste !

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Le voyage, c’est la rencontre

Ce n’est pas tout, la route continue, le désert aussi et nous décidons de profiter d’un point de vue immensément beau pour nous arrêter pour déjeuner.

Nous sommes seuls au monde, l’on pourrait marcher tout droit vers l’horizon pendant des semaines sans croiser une âme. Nous voyons alors s’approcher deux cyclistes, étonnamment ce sont des visages inconnus, on les invite tout de même à s’arrêter. Il s’agit d’un néerlandais et d’un gallois qui étaient sur le ferry avant le nôtre, ils ont bien pris leur temps pour arriver. L’un d’eux a un problème de câble de dérailleur, mes amis ayant à peu près tout dans leur camion, remplacent son câble et sauvent son voyage. Vive la rencontre en voyage !

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Nouvelle rencontre en voyage avec Aldo

C’est alors qu’un bruit de moteur suscite notre attention, une moto vient de s’arrêter à côté des camions… Il s’agit ni plus ni moins d’Aldo, encore lui, mon copain de l’auberge de Bakou, qui a reconnu les deux camions blancs.

Il m’explique qu’il est aussi très agréablement surpris de me voir dans le groupe car il commençait à s’inquiéter de ne pas m’avoir croisé plus tôt sur la route. La communauté des voyageurs est comme une grande famille solidaire.

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Il se joint à nous et nous terminons la route tous ensemble jusqu’à Beïnéou, tel un vol d’oiseaux migrateurs groupés se relayant pour fendre l’air chaud du désert.

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Nous serons l’avant-garde des voyageurs du ferry, les premiers à atteindre Beïnéou.

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