71. Une panne dans le desert (OUZBEKISTAN)
Après une soirée bien agréable dans la fraicheur de desert avec mes amis du ferry, nous subissons un réveil bien agité, causé par un fort vent d’est annonciateur de la journée qui va nous attendre en Ouzbekistan.
Tempête de sable pour le petit déjeuner
Je n’ai pas mis le double toit de ma tente pour mieux admirer les étoiles… erreur de jeunesse.
Le vent en a profité pour infiltrer dans ma tente une grande quantité de poussière de sable. Cette poussière de sable s’infiltre partout où elle le peut : dans le sac de couchage, dans les oreilles, les cheveux, le nez, rien n’est épargné. Réveil matinal forcé, donc, agrémenté d’une séance de pliage de tente sous une demi tempête de sable digne d’une farce à la Chaplin.
Rouler dans le desert
Nous mangeons un bref petit déjeuner mais avalons plus de sable que de nourriture, nous décidons donc de partir. Notre camarade allemand nous précède, bonne chance et adieu. Nous décollons en tir groupé de français et nous apprêtons à affronter une route assez inamicale pour les amortisseurs.
Du sable, du vent, de la poussière, la chaleur, parfois des zones de bitume remplies de gigantesques nids de poules obligeant à faire des écarts brusques qui nous font atterrir dans un autre trou encore plus gros. Des conditions de route vraiment épuisantes pour les conducteurs et pour la mécanique, à tel point qu’Aldo finit par arrêter sa moto en reniflant une odeur de brûlé émanant de sa monture, supposant que son frein à main n’aurait pas été desserré. Il ne croit pas si bien dire, sa roue arrière fume dangereusement.
De la casse en plein desert ouzbek
Il la démonte pour diagnostiquer le problème et l’on comprend vite que le soucis va nécessiter une pièce de rechange qu’il n’a pas : le roulement à bille a explosé au milieu de la roue, ce qui a causé le blocage de son frein à tambour.
Un peu désespérés par la situation qui sent fort le roussis (littéralement et métaphoriquement), nous réalisons toutefois que nous ne sommes pas complètement perdus au milieu du desert d’Ouzbekistan. Aldo a eu l’intelligence d’arrêter sa moto à proximité d’une sorte de portique sous lequel passent les véhicules et où les gens attendent à l’abri du soleil pour trouver une bonne âme solidaire pour les emmener à la prochaine ville.
Nature hostile = solidarité des hommes
Ici l’entraide et l’auto-stop sont institutionnalisés, quand il y a une ville tous les 150 kilomètres dans un milieu désertique, hostile et poussiéreux, on apprend vite à user de la solidarité des gens, et les gens vous aident car c’est normal.
Ici, l’entraide ne vient même pas de bons sentiment ou par bon coeur, elle est tellement la norme que l’on ne se pose même pas la question, c’est comme ça. Une personne a besoin de mon aide, je l’aide, point.
Quand par chez nous, croiser une âme dans le besoin engendre un combat intérieur entre notre soif de bonne conscience et notre individualisme profond. Un combat à l’issue très incertaine mais qui éveille chez nous une immense fierté lorsque notre côté altruiste gagne la bataille. On s’en gargarise, on se dit qu’on est tout de même une bonne personne, que l’on a ajouté une pierre de plus dans le mur de la Paix. On a envie de le crier à qui veut bien l’entendre car notre coeur déborde de fierté et de bienveillance envers le genre humain ! Ici, rien de tout cela. On aide sans même attendre de merci et on continue sa route sans y repenser. La vie continue, on a juste fait ce qu’il y avait à faire, ni plus ni moins.
Trouver une pièce de rechange dans le desert
Et Aldo est là, avec nous dans cette zone perdue, avec pour seul espoir la solidarité locale. Il nous faut en urgence un nouveau roulement à bille, mais comment trouver ça dans le desert en Ouzbekistan à “mille milles de toute terre habitée” ? C’est alors qu’un enfant s’approche de nous et nous dit : “S’il vous plaît… dessine-moi un mouton !”.
Bon ça ne s’est pas exactement passé comme ça ! En réalité, un jeune homme qui attendait une voiture à quelques mètres de nous et qui nous sentait en difficulté est venu nous voir pour nous prêter main forte.
Il a vite compris ce dont nécessitait la moto, et nous a guidé vers le village le plus proche (quelques kilomètres à peine) pour y trouver un petit bazar local avec un marchand qui vendait exactement la pièce de rechange nécessaire. Une chance inouïe pour Aldo, qui aurait pu se retrouver dans une situation plus qu’inconfortable si cette même panne lui était arrivée au milieu de nulle part.
Il a réparé sa roue avec le nouveau roulement et le tour était joué, on pouvait repartir.
En Ouzbekistan, le desert est brulant !
Nous sommes sur la route, encore et toujours baignés dans cette fameuse poussière de sable qui s’insinue jusque dans nos poumons, nous contraignant à couvrir nos voies respiratoires d’un tissus humide.
Il y a cette route délabrée, en charpie, obligeant le conducteur à une vigilance permanente.
Il y a ce soleil aveuglant qui se reflète sur ce sable d’une blancheur éclatante. Et il y a cette chaleur, et quelle chaleur ! Je n’ai pas de thermomètre sur moi mais elle dépasse forcément les 40 degrés à l’ombre… Sauf qu’il n’y a pas d’ombre. Dans ce désert, les seules zones épargnées par ce soleil assommant sont les ombrages des petites plantes à moitié desséchées qui verdissent çà et là, au hasard d’une mer de sable infinie dont on n’en distingue les aspérités qu’à travers le flou des mirages qui dansent au gré des brûlures du sol. On dirait presque que la terre abuse de ces danses macabres pour exprimer sa souffrance.
Le plus impressionnant c’est que lorsque l’on passe la main par la fenêtre pour se rafraîchir, c’est un vent chaud qui nous répond, un vent très chaud. Si l’on pouvait comparer à une sensation vécue, ce serait la même chose que mettre sa main à 20 cm d’un sèche-cheveux !
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