Europe

16. Triste et froide journĂ©e d’hiver Ă  vĂ©lo (Kecskemet / HONGRIE)

Puisqu’il faut souffrir, découvrons ensemble un exemple type de la bonne journée de vélo hivernale bien pourrie, baignée de froid et de solitude. 

Souffrances physiques et solitude

Après avoir passé Vienne, Bratislava et Budapest, je continue ma traversée à vélo de la Hongrie en plein hiver. Unique point positif de cette journée à oublier : c’est très plat. En revanche les routes de la campagne Hongroise sont d’une qualité plus que médiocre. Chaque trou, chaque bosse, se transforme par magie en un coup de couteau dans le bas du dos. La douleur est sourde, silencieuse dans cette campagne vide, isolée et perdue, comme moi. Les seules manifestations de vie dans ce désert blanc viennent des chiens des rares villages croisés sur la route.

Triste campagne hongroise

Les chiens, seuls compagnons de route

Les chiens de Hongrie passent leur temps dans le jardin à guetter le retour de leurs maîtres. Pour colmater leur ennui et la tristesse de l’hiver, ils sont donc à l’affût du moindre événement inhabituel… Je suis l’événement inhabituel. Cela offre un festival d’aboiements, une chorale destructurée et pataude dont le but n’est pas de plaire ou de faire peur à l’étranger, mais plutôt de combler un vide et se sentir appartenir à un groupe. Maudire ensemble, quoi de mieux pour créer un lien social et remplir les abysses de son existence. La psychologie canine n’est peut être pas si éloignée de celle des humains. 

Cette hostilité du “meilleur ami de l’homme” ne m’a pas aidé dans cette grande journée de froid et de solitude. Ne croisant pas la moindre âme qui vive dans ces villages tristes et figés, ces chiens étaient à peu près la seule interaction sociale de ma journée… pas de quoi réchauffer le cœur. 

Le peu de personnes que l’on croise vous observent comme s’ils avaient vu un extraterrestre. Ils ne répondent même pas aux saluts, se contentent de me fixer et me suivre du regard d’un air hagard. J’ai la très désagréable impression d’être séparé des populations locale par un énorme mur de glace.

Un repas froid et solitaire

A l’heure du déjeuner, pas le moindre restaurant à l’horizon, même pas un quelconque endroit dans lequel j’aurais pu manger ma nourriture au chaud. La température a beau s’améliorer, le thermomètre oscille toujours vers les -5°. Je passe de villages en villages, espérant, à chaque tentative tomber sur ce Graal. Je remarque finalement deux hommes aux allures d’ouvriers qui évidemment ne parlent absolument pas un seul mot d’anglais. Le mot restaurant fonctionnant à peu près dans toutes les langues, ils semblent comprendre ce que je cherche mais me répondent froidement qu’il n’y a rien ici. Je les remercie quand même, je m’éloigne, et après avoir pesté pendant quelques minutes contre les pays du Tiers-Monde, je me résigne à m’asseoir avec mon vélo sur un banc enneigé. Je balaye la neige, m’assieds sur du froid et je mange quelques réserves de nourriture que j’avais sur moi. Au menu ce sera carottes crues à moitié gelées, sandwich glacé au fromage et jambon du coin de mauvaise qualité et eau à l’état solide. Je n’ai jamais eu autant froid aux mains et aux fesses pendant un repas, et j’ai rarement mangé avec si peu de plaisir.

Un déjeuner bien modeste

Triste soirée d’hiver

Mon étape du soir à Kecskemet sera à la hauteur de la journée : morne, solitaire et décevante. N’ayant pas eu la chance de trouver des personnes assez généreuses et curieuses pour m’accueillir, j’ai dû me résigner à réserver une chambre dans une sorte d’auberge sordide. Mais désirant tout de même clôturer cette journée par du positif, je décide d’aller au restaurant. Je me rends dans une pizzéria du quartier conseillée par un client de l’auberge, me commande une bonne bière et tente une pizza chicken en pensant y trouver de beaux morceaux de poulet… c’est une pizza au foie de poulet qui est venue se poser sur ma table. Sans doute possible la plus mauvaise pizza de ma vie ! Le livre de cette journée s’est fermé comme il s’est ouvert, avec une désagréable odeur de froid, de solitude et de vomi.

Seul sur la route

>>> ETAPE SUIVANTE : 17. Bienvenue dans les Balkans (Voïvodine / SERBIE)

Charles

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