Russie

102. Un passage de frontière surprenant (RUSSIE / UKRAINE)

La Russie, ses autoroutes, ses moustiques et ses dames sont déjà derrière moi. Je m’apprête à passer la frontière qui sépare la Russie de l’Ukraine. Je croiserai aujourd’hui trois différents types de douaniers : Un opportuniste, un faux méchant, et un retardataire généreux.


Le premier douanier ukrainien : le « businessman »

Je conclue rapidement les 10 kilomètres de route qui me séparent de l’Ukraine. Je passe sans encombres la frontière russe et j’aborde l’ukrainienne avec la confiance que l’expérience du voyage est en train de m’apporter.

Je suis stoppé à la barrière par un militaire qui, en apprenant mon origine, me demande de voir ma panoplie de pièces de monnaie en Euro, prétextant qu’il en fait collection. Je lui montre tout sauf ma précieuse pièce de 2 €. Déçu, il m’explique qu’il les a déjà toutes. Le voyant un peu triste, et désirant le consoler je lui montre ensuite toutes les pièces qui me restaient de mon voyage et nous tombons d’accord sur une pièce de Somonis du Tadjikistan. Il la garde avec lui, il est content et me laisse maintenant passer. Quant à moi, j’allège un peu mon portefeuille et je passe la frontière à peu de frais.

Tarif du « pot-de-vin » : 2 centimes d’euros.


Deuxième douanier de la frontière Russie – Ukraine : le faux-méchant

J’arrive au custom control de la frontière Russie – Ukraine. Un homme très antipathique me tient tête, il est très brun, mate de peau et une conséquente surcharge pondérale. Pas un sourire, le regard fermé de l’homme qui ne va rien laisser passer.

En observant le désordre de son bureau, j’y remarque quelques objets familiers : la petite tasse en verre pour le thé turc, le genre de chapelet musulman très commun en Anatolie (Tesbih), et une vieille photo en noir et blanc de Mustafa Kemal, alias Ataturk !

Certain du coup que je prépare, je lui lance au visage toute la palette de mots turcs que j’ai encore en mémoire. Le fait que ces mots sortent de ma bouche semble à ses yeux d’une délectation sans précédent. Son visage s’illumine de mille feux, comme si son village natal lui apparaissait à l’horizon. Et cet homme que je croyais fermé et désagréable s’est avéré charmant.

Je lui ai fait sa journée, et moi j’ai pu avancer rapidement.


La douane est derrière moi, la route ukrainienne m’ouvre les bras.

Troisième homme de la frontière : le retardataire généreux

C’est parti sur une longue route toute droite, bordée d’arbres et rythmée de côtes et descentes successives qui me rappelle amèrement la Russie.

Une voiture me dépasse alors, s’arrête quelques dizaines de mètres devant moi, et un homme en treillis militaire sort de sa voiture et me regarde fixement, il se positionne sur la route comme pour me faire comprendre qu’il doit me parler.

Je m’arrête… ne sachant absolument pas à quoi m’attendre. Il me sourit et me serre la main chaleureusement en m’expliquant qu’il est lui-même passionné de cyclisme, qu’il fait des courses en amateur, et de fil en aiguille, il en vient à me proposer de prendre un café chez lui. Il est 12:30, j’ai faim et j’ai déjà repéré sur mon GPS un restaurant dans quelques kilomètres. J’insiste donc pour que l’on aille plutôt ensemble dans cet endroit en lui expliquant ma situation.

Il accepte, me suit patiemment dans sa voiture et nous y arrivons. Je commande de quoi faire le plein de calories et mon compagnon m’explique un peu son histoire. Cet homme n’est autre qu’un officier de la douane ukrainienne qui, en me voyant passer à vélo devant son bureau, n’a pu s’empêcher de prendre sa pause, monter dans sa voiture pour me rattraper et parler avec moi de sa passion du vélo. Il me parle en me regardant manger avec bienveillance.

Le spectacle que je lui offre ne doit pourtant pas être franchement séduisant : Il voit en face de lui un galvaudeux sans domicile fixe depuis sept mois, le visage et le corps moite et rougis par l’effort et le soleil, plantant frénétiquement sa fourchette dans un plat exagérément salé par les gouttes de sueur qui perlent de son front et finissent leur chute dans sa nourriture. Il l’écoute le regard vide, en ruminant sa pitance, répondant une fois sur deux dans un accent anglais approximatif. Parler la bouche pleine a l’avantage de faire gagner du temps, mais il ne favorise ni l’élégance, ni la compréhension. Ces conditions archaïques n’ont pas semblé perturber mon “ami du déjeuner” et le repas était tellement bon et copieux que je n’ai pas eu l’énergie nécessaire pour le stopper quand il a insisté pour me payer mon repas.

“Quel pays accueillant !” me disais-je, “ici, les douaniers invitent les voyageurs à déjeuner en guise de bienvenue”… ”Et ils restent même en contact avec eux pour s’assurer que tout se passe bien pour eux”.

La douane Russie – Urkaine, je m’en souviendrai !

>>> ETAPE SUIVANTE : 103. Très mauvais choix de Bivouac (UKRAINE)

Charles

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