Une réflexion m’est venue alors que j’étais en pleine lutte contre mes frères ennemi de ces derniers jours, le froid et le vent. Voilà, je me suis rendu compte que lorsque l’on voyage en solitaire, que l’on passe la majorité de son temps seul sur son vélo, notre instinct d’animal social est soumis à rude épreuve. On en vient donc à s’inventer des amis, ou plutôt des compagnons de route, et on leur parle. On se prend à personnifier un élément, un phénomène météorologiques ou un objet. En quelques jours, ils leur apparaissent une personnalité, une manière de communiquer, un sens de l’humour. Voici une liste non-exhaustive de mes camarades de route : le soleil, le vent, le froid, la neige, le Danube, le GPS, mes jambes, mon dos, mon vélo… Certains sont plus mes copains que d’autres. Par exemple le soleil c’est mon grand pote, il m’a sorti de bien des galères, en accélérant la fonte de cette satanée neige par exemple ! Le froid, lui je ne l’ai jamais trop apprécié. Il est arrivé discrètement au tout début, et a trop rapidement pris ses aises, pour ne plus me lâcher. Je lui avais pourtant dit poliment de prendre un peu l’air mais il se sentait bien avec moi. Allez comprendre ! D’autres camarades ont une personnalité plus complexe, ils peuvent être votre ami un jour et votre pire ennemi le lendemain. J’ai nommé : ce bon vieux Jean-Guy ! Et ces jours d’Europe Centrale il ne m’aime pas trop mais je saurai lui faire changer d’avis.
Je ne sais pas si le fait de parler au soleil, à ses jambes ou à son vélo trahit un début de dérèglement psychique. Il est toutefois certain que cette déviance complètement symptomatique des personnes isolées prouve encore une fois de l‘intérêt d’un voyage en solitaire. Ne jamais pouvoir partager ses souffrances ou ses frustrations est une torture qui permet d’accéder à des zones inconnues de notre psyché. Seule la solitude au long cours autorise un certain voyage intérieur et l’exploration profonde de notre personnalité. Seul, on doit se battre deux fois plus, contre les éléments extérieurs et contre nous-même. En ce moment, chaque journée est un combat sans pitié.
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