Quitter Moscou en Russie par l’autoroute et rentrer à Paris en un seul morceau. Telle est ma dernière mission, mon ultime combat. Contrairement à la Grande Armée de Napoléon, je rentre mais je rentre vainqueur. J’ai tout gagné et je suis nanti comme je ne l’ai jamais été. Mon cœur est riche à milliards, à trilliards peut être, je ne saurais dire et peu importe… les territoires que j’ai conquis sont plus étendus que l’empire d’Alexandre le Grand !
Sortir à vélo de l’agglomération de Moscou est une épreuve longue et délicate.
On suit l’autoroute pour éviter les dangereuses banlieues sud et on flirte avec le péril des bretelles d’entrée et de sortie, c’est la Russie. On avance tant qu’on peut, mais la ville n’en finit jamais. Quand bien même les forêts semblent avoir remplacé durablement les dernières barres d’immeubles, de nouvelles barres font leur apparition un peu plus loin.
Sur la route, tout s’oppose à ce que j’ai connu en Asie Centrale : la route est très dense et les stations services ont succédé aux animaux écrasés au rythme d’une tous les cinq kilomètres ! Elles poussent même au milieu des bois. Soit dit en passant elles n’ont pas trop le choix, car au sud de Moscou la forêt est absolument omniprésente… Et ornée de panneaux “feux interdits”. Discrétion indispensable aux prochains bivouacs.
J’avance sur la bande d’arrêt d’urgence de cette autoroute qui se réduit à quatre voies. En Russie, l’autoroute est autorisée aux vélos… enfin disons plutôt qu’il n’y a pas de règles à ce sujet. C’est “open-bar” à vos risques et périls.
À ma droite, un aéroport. En face de moi, des centaines de véhicules à l’arrêt, je double tout ce petit monde et me retrouve face à trois grands feux rouges. Je m’arrête par réflexe et commence à réfléchir. Manifestement ces feux servent à laisser sortir des convois exceptionnels, car une route spéciale lie directement l’aéroport à l’autoroute.
Personne ne bouge et pourtant il ne se passe rien, le feu semble bien inutile. Aucun mouvement du côté de l’aéroport et un silence de mort malgré la présence de plusieurs centaines de voitures obéissantes. Même les moteurs sont arrêtés, je n’entends plus que ma respiration. Ne sachant absolument pas combien de temps peut durer cet arrêt forcé, je prends le parti de griller doucement les trois feux.
Ça passe comme dans du beurre, je suis libre !
La suite est plus qu’exaltante : j’ai pendant dix minutes une autoroute à quatre voies pour moi tout seul, quel bonheur ! Le bitume est mon terrain de jeu, je profite de cette méga-piste-cyclable en la traversant de gauche à droite tout en surveillant du coin de l’œil le retour des voitures.
Sensation de liberté, de toute puissance même ! Quand une autoroute comme celle-ci nous appartient, c’est comme si le monde était à nous. En tant que cycliste on a l’impression d’être le roi du monde.
Un enfant qu’on lâcherait seul dans un magasin de jouets une heure avant l’ouverture des portes aurait la même sensation grisante. Et puis peu à peu les voitures font leur entrée dans le magasin de jouets, je ne suis plus seul. Ce fut court mais beau.
C’est bien la troisième fois que j’expérimente ça. Pour rappel, la première fois, c’était en Turquie à l’occasion d’un barrage militaire dans la zone kurde, et la deuxième, c’était sur une autoroute en construction en Azerbaïdjan.
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